Levé à 4h, en prenant un café et une part de marbré, Eric s’administre ses médicaments habituels et un demi-Xanax.
Sur son poste de télévision passe Rocco et ses frères de Luchino Visconti. Il enchaine assez rapidement avec Adoption de Márta Mészáros. Passer d’un film italien à un film hongrois ne lui fait pas peur, il apprécie de découvrir de nouvelles sonorités.
Ensuite, par une impulsion soudaine, il sort pour un long trajet en transports en commun vers le centre commercial "No Single Town". Il a le désir de s’acheter une paire de baskets.
Déjà bien avancé à l'intérieur d'un magasin de vêtements quelconque, un vigile le suit à la trace et lui demande de manière courtoise de déposer son sac à l'entrée. Quelque chose le pousse à lui dire que rien n'indique sur la devanture qu'il faut déposer son sac. Le vigile, interdit, en convient et s'en excuse. Alors Eric lui demande où se trouve les sous-vêtements pour adolescents. Ne sachant où le diriger, le vigile demande l'aide d'une collègue puis, il l’invite à déposer son sac en échange d'un badge numéroté #5. Finalement, ne trouvant rien, Eric s'éclipse en le saluant.
Il trouve son bonheur (si l'on peut dire) dans l’enseigne de vêtements "Stockomani". Là, trois boxers et un tee-shirt pour son fils l’attend. Puis, après avoir flâné dans un "Darty" et un "Electro Depot" pour un hypothétique désir d'achat d'une chaine Hi-Fi, il se dirige vers "Auchan" et se prends une fougasse aux lardons, une tresse chocolat pistache et un Paris-Brest. Il marque un temps d’arrêt et, après mûres réflexions, se dirige aux rayons frais pour une brique de chèvre. « J'ai la tête qui tourne et pourtant je n'ai pas faim », constate-t-il.
Attendant l’arrivé du bus retour, il comtemple une mère chantant une berceuse africaine à son enfant en bas âge.
Eric écrit.
C’est sa petite thérapie pour garder une activité cérébrale constante et pour analyser en somme son angoisse. Dans le tramway il relève la tête de son texte journalier et croise le regard d'un homme avec une tâche sur son visage en forme de triangle sur le pourtour de son œil gauche. Tatouage ? Tâche de naissance ? Cela semble bien trop symétrique pour être naturel…
Huit minutes s’écoulèrent avant que le deuxième tramway qui le ramène chez lui s’avance.
Pendant ce lapse de temps, un défilé de mères de famille avec poussette, occupé à parler fort sur leur portable se font écho. « Je n'ai pas besoin de relever la tête de mon texte », se dit-il. Les langues et dialectes se bousculent et deviennent un bruit de fond. S'y ajoutent les coups de freins des voitures et bus qui circulent sans fin. Un enfant fait ses vocalismes. « Il peut, personne ne le perçoit vraiment… Ah, enfin le tramway ! »
Sur le trajet Eric aperçois une corneille avec un énorme morceau de pain dans le bec. Face à lui une jeune femme lui fait partager sa musique comme le fond la plupart des gens avec leur portable. « Au fond, peut-être une certaine idée du vivre ensemble », pense-t-il comme base conclusive.
En sortant, Eric suit le mouvement de tout à chacun et traverse en dehors des clous. Le marché des Rocailles est encore en activité mais il se vide lentement. Une petite bottine noire est abandonnée sur une pierre taillée. Les déchets s'amoncellent sur la voie. Tout autant concentré à écrire qu’à garder une marche constante, Eric ne se rend pas compte qu’il gêne un agent de la propreté en bloquant sa progression déjà penible. Au loin, un marchand se plaint à un autre de la régulation du marché.
Après avoir déposé ses achats dont une partie directement dans la chambre de son fils, Eric remplit sa bouteille d'eau et se prend un demi-Xanax. Pendant ce temps sa fougasse (est-ce une fougasse d'ailleurs ? Plutôt une mini pizza avec des morceaux de pommes de terre et des lardons) se réchauffe au four.
« Allumons la télé ! » Comme à son habitude il zappe entre France Info et Arte. « J'ai la tête lourde. Mangeons ! »
La fougasse est lourde, il n'en mange que la moitié. Il fait passer le tout avec un verre de jus de gingembre et attaque le Paris-Brest.
Le poste de télé de nouveau allumé, il regarde Withnail and I de Bruce Robinson et entame la tresse sans grande conviction… Il a grand mal à suivre le film pourtant très bien.
S'ensuit un appel téléphonique de sa sœur Lucie juste au moment où il allait éteindre son poste. La discussion dure presque une heure. Tout en prenant des nouvelles de son état de santé, elle lui propose de venir faire un séjour chez elle dans le Nord pour se ressourcer… L’idée n’est pas mauvaise.
Il est 17h. Eric sent que ses yeux s'alourdissent. Il se dirige vers son lit. Trois heures plus tard une douleur vive à l’épaule droite le sort de son sommeil. Le coaltar l’habite. Il lui faut trente minutes pour vraiment émerger et se diriger vers son salon. Là l'attend son demi-Xanax et une absence totale de faim. Il se force à manger un quart de fougasse qu’il descend d'un verre de jus de gingembre.
Eric est un abonné assidu à Netflix depuis déjà une bonne dixaine d’années. Plusieurs fois il a eu l’intention de se désabonner mais il y a toujours un film ou une série qui l’enchaine à ce service de streaming. Le sentiment de dépendance est constant. Un grand pas sera sûrement franchi quand il se décidera à quitter ce service. Il est toujours difficile de se sortir d’une addiction… seul.
En attendant, il regarde les deux premiers épisodes de l'adaptation live du manga One Piece, une très bonne surprise pour l'instant. Puis il enchaîne sur Arte avec La Fille à la Valise de Valerio Zurlini sachant que, vu son état pitoyable, il ne risquait pas de s'endormir de sitôt…
Coût de cette journée : Non définie.