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Pascal Craveri - Auteur BD

Je suis auteur de BD, illustrateur et portraitiste. Edité chez MORRIGANE éditions sur 4 romans jeunesse. Auteur également de la série BD en 3 tomes "SUIS LE FLEUVE" chez YIL édition. Depuis 2010 je dessine mon fils tous les mois! :)

Le Coût d'une journée - Chapitre 1 : Vingt-cinq jours d'arrêt _ 6

Publié le 15 Avril 2024 par Pascal Craveri in Le Coût d'une journée

Eric essaye péniblement de dormir après avoir lu quelques pages de Maxi Plotte de Julie Doucet.

Il ne cesse de faire un va-et-vient entre son lit et son salon. 1h du matin s’affiche déjà sur son portable.

Après avoir avalé un Doliprane, nous le retrouvons dans son salon laissant ses sens affutés prendre le relais : écouter le silence de la nuit, le bruit sourd du réfrigérateur… La possibilité d’une berceuse peut-être ? Raté on dirait.

Que faire alors ? Rallumer la télé ? Regarder les derniers épisodes de /The Walking Dead\ ? Lire ?

« Oui lire c'est mieux ! Cela va me fatiguer et m'inciter au sommeil. »

Eric s’exécute, puis s’endort.

Il est 6h quand le réveil de Lucas sonne.

Eric, pourtant, met presque deux heures à sortir de sa torpeur, étalé sur son lit comme du beurre fondu sur une tranche de pain.

S’estirpant durement de sa couche avec le manga Boruto : Naruto Next Generation #17 de Mikio Ikemoto et Masashi Kishimoto qu’il s’apprête à ranger, il se fait surprendre par son fils (fraîchement levé après trente minutes d’une dure émergence) venant se blottir dans ses bras.

L’étreinte exercée par Lucas associée à cette chaleur oppressante provoque une vive réaction de rejet de sa part. Interdit, son fils lui demande alors de lui mettre un pansement sur le petit orteil de son pied gauche écorché la veille par ses claquettes. En effet l’ensemble bermuda et claquettes est de mise tant les températures sont élevées : 35°C d'après la météo et déjà 20°C ce matin !

En sourdine derrière la porte d’entrée, on arrive à identifier les personnes chargées de nettoyer les escaliers battant vigoureusement de leurs balaies.

Son épaule le faisant souffrir, Eric obtient après moultes tentatives un rendez-vous avec son kinésithérapeute.

Lucas parti, il regarde Amants de Vicente Aranda.

Profitant du peu de fraîcheur matinale qui pourra lui être alloué, il abandonne de suite l'idée d'aller à la Piscine : en cause le nombre important de zones fermées. Il n'aura pas pu profiter du bain à bulles de l’été !

Une femme dans le tramway s'avance avec son portable le son allumé à fond. S’inquiétant d’une réaction trop vive, Eric prend intelligemment la fuite. Sur son passage, un homme court avec son enfant pour rattraper un bus. Il est en jean taille basse.

Continuant son chemin à pied, il laisse le titre Little Star de Stina Nordenstam tourner dans sa tête.

Il s’arrête à la "Fnac". Un bébé babille très fort dans sa poussette, sa mère le promenant à l’intérieur du magasin tout en discutant sur son portable.

Eric jette son dévolu sur le roman Psychopompe d’Amélie Nothomb et le film La Ballade de Narayama de Shōhei Imamura (27,95 € le tout).

En descendant la rue International, il s’arrête chez un disquaire au hasard et trouve — « Quelle surprise ! »— le vinyle Blackbox Life Recorder 21f / In a room7 F760 d’Aphex Twin à 33 €. Eric sort un juron intérieurement en sortant sa bourse.

« J’ai encore un peu de temps avant le retour de Lucas » calcula Eric en reprenant le tramway.

« Autant on peut effacer d’un coup de doigt une petite goutte de sang, autant on ne peut effacer une telle misère », c’est cette pensée qui traversa son esprit quand il contourna une mendiante en habit rouge face à l’enseigne "Action".

Circulant dans le magasin "La Foir’Fouille", Eric fit le choix d’un meuble pour sa salle de bain (29,99 € en promo), « j'en ai marre de voir traîner tout et n'importe quoi sur le panier en osier que je vais de toute manière bazarder ! »

De retour chez lui, il attaque directement le montage du meuble. Ne supportant plus non plus la vue des fioles et produits périmés dans sa vieille armoire de salle de bain, il met dans un grand sac poubelle une grande partie et réaménage l'ensemble au mieux. Au passage, il met les vêtements contenus dans le panier en osier dans un sac en toile. C'est au moment où il allait tout mettre aux ordures que Lucie l’appelle pour reprendre de ses nouvelles. Finalement l’idée de venir se ressourcer chez elle prend forme et ils tombent d'accord pour une date vers la mi-octobre. Il fait très chaud, 30°C.

Au retour une douche s'impose, son fils rentrant dans deux heures. Mais Lucas l’attendait déjà pour manger ! Il lui prépare alors rapidement un plat, mais, pour sa part, il se contente que d’un morceau de fromage de chèvre, une banane et un verre de jus de gingembre.

Lucas prend le risque d’interrompre le film Courage de Mario Camus (que son père s’usait à visionner pour accompagner sa digestion) pour l’informer que ses documents scolaires n’ont pas été acceptés par sa prof de français car il n'y avait pas la signature de sa mère. Eric rétorque. Cette femme est conne vu que son statut de responsable légal est amplement suffisant ! Mais Lucas l’apostrophe en lui intimant de respecter sa professeure :

« C'est la meilleure des profs ! »

Eric ne relève pas l’audace de son fils car en un sens il avait raison. Sa réaction était bien trop disproportionnée. Une telle erreur de sa part aurait été éliminatoire dans d’autres circonstances. « C’est de personnes réfléchies dont on à besoin », son chef instructeur le lui avait bien assez asséné lors de sa formation.

Après avoir gobé Bienvenue Monsieur Marshall ! de Luis Garcia Berlanga, Eric part écouter son disque.

Ce qui est bien avec les albums vinyle c'est que l'on peut les écouter à des vitesses différentes. La possibilité de changer la vitesse permet de rendre la piste plus sombre.

Il envoie bouler son fils quand celui-ci, perturbant son écoute expérimentale, lui demande le menu de ce soir.

Le Vélo de Ghislain Lambert de Philippe Harel est avalé par Eric autant que l’on puisse avaler des kilomètres les mollets en feu.

Sans la présence de son fils, il est fort probable qu’Eric ne se serait pas alimenté. Il descend donc affronter la chaleur étouffante pour faire des petites courses au supermarché. Malheureusement il a droit à la caisse à un mauvais étiquetage sur des pizzas surgelées. La caissière est bien énervée à cause d’un poivrot qui a pété une de ses canettes dans son sac sans l'avoir encore payé. Celle-ci lui parle comme à une merde (il faut dire qu'il avait l'aspect et l'odeur), il lui crache de mieux lui parler (ce qui est vrai) mais que la prochaine fois il lui casse la gueule (là c'était très con car maintenant il sera systématiquement refoulé).

De retour, Eric se fait un gavage de Benoît Poelvoorde avec Mon pire cauchemar d’Anne Fontaine et Une Place sur la Terre de Fabienne Godet.

Hors de question de se faire les pizzas surgelées maintenant ! Il se force donc et prépare une sorte de couscous raisins, concombre, tomates et lardons avec un assaisonnement d'huile d'olive, de sel, de poivre et de vinaigre balsamique.

Son bras droit l'élance...

En cherchant à voir un autre film, il tombe finalement sur Lulu femme nue de Sólveig Anspach… Tiens ! Le titre lui dit quelque chose.

Comme ci cela ne lui suffisait pas, il éponge les derniers épisodes de la série /The Walking dead\.

 

Eric n’est pas sûr d’avoir assimilé la moitié des films de la journée. Dommage qu’il n’y ait pas des toilettes dédiées pour vider une cervelle si boulimique. Car il a encore faim !

 

Coût de cette journée : 90,94 € et un vomito.