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Pascal Craveri - Auteur BD

Je suis auteur de BD, illustrateur et portraitiste. Edité chez MORRIGANE éditions sur 4 romans jeunesse. Auteur également de la série BD en 3 tomes "SUIS LE FLEUVE" chez YIL édition. Depuis 2010 je dessine mon fils tous les mois! :)

Le Coût d'une journée - Chapitre 2 : Sans éclat _ 1

Publié le 22 Avril 2024 par Pascal Craveri in Le Coût d'une journée

La petite fuite de la veille a su redonner de l’entrain à notre protagoniste. Il lui a pourtant fallu du temps pour que son corps comprenne qu'il faille dormir cette nuit. Il est 4h du matin, ses vingt-cinq jours d’arrêt ont été soldés et il doit retourner au travail : « Mes dernières semaines. »

Comme à son habitude, il fait son café et allume la radio pour mettre France Inter. Dans la rediffusion de l'émission "Grand Bien vous fasse" on parle du bien-être au travail.

Départ.

Il croise un jeune chat gris à côté d’une canette de Red Bull qui trône au milieu de la place des Rocailles.

À l'arrêt de tram, il discute avec des travailleurs qui se souciaient de son absence prolongée. En descendant à sa correspondance, il est étonné de voir que son collègue, Q-thin, n'y descend pas. Un oubli ? C’est vrai qu’il a l'habitude de s'endormir dans les transports. Eric s’est toujours demandé si cela n’était pas une technique pour rester à l’affût sans que personne ne puisse s’en apercevoir. « Je le surestime un peu trop » soupira-t-il dans le tram tout en s’enfonçant dans son siège.

Ce sont les yeux grands ouverts qu’il suit le rythme du tramway jusqu'à son arrivée à "La Cité Univers". Le matin, les gens sont moins bruyants que d'habitude mais cela n'empêche pas le concert des portables.

Arrivé au travail le constat est accablant. Une motivation au degré zéro pour la plupart des employés, des engueulades dès les premières minutes. Eric pensait qu’il aurait pu terminer sa carrière dans une structure où on l’aurait envoyé vers des missions de nettoyage avancés (vu son curriculum vitae, on l’aurait laissé tranquille) mais il déchanta très vite.

« Vais-je tenir pendant encore deux semaines ? »

B-za, fraîchement arrivée, est sûre de quitter les lieux à la fin du mois. « Elle est surtout sûre d’être nettoyée si elle ne garde pas ses opinions pour elle » s’agaça Eric.

D-anh, un autre de ses collègues, aspire à devenir professeur de technologie dans les cinq ans ; en espérant rester ici pour gagner assez d’argent. Lui qui déjà se plaint de problèmes physiques tiendra t-il longtemps ? « Mais qu’ont-ils donc à s’épancher en ma présence ? » fulmina Eric. « J’inspire tellement confiance ? »

Ce qu’Eric n’arrivait pas à intégrer c’est que pendant les vingt-cinq jours où il a été absent, ses collègues ont vite établi qu’il avait un degré de dangerosité proche de zéro. Il n’était plus une référence à suivre. Il est devenu un épanchoir.

Réunion d'information aujourd'hui, le Pourvoyeur leur fait part de ses objectifs et des points à revoir pour gagner en efficacité et en productivité. Sauf qu'il n'a pas de visibilité sur la trésorerie actuelle. D'ailleurs un gros client viendra mercredi prochain pour faire un audit ( ?). Eric se demandait avec quoi ils allaient faire leur enquête. Ces agents allaient-ils décortiquer la dernière affaire qui l’avait fait presque basculer dans la dépression ? Eric se sentait détaché de tout cela, il releva juste qu’il allait devoir porter un nouveau tee-shirt les trois derniers jours de son contrat.

Dans le tram retour, Eric se demandait s’il allait arriver à temps pour son rendez-vous avec cette psychologue à 15h. L’hôpital lui avait suggéré ce service et, en utilisant une de ses identités, il prit l’initiative d’un premier échange. Il commençait à avoir faim (il n’avait mangé qu'une banane au travail alors forcément…)

Il ressort au bout d'une heure. Eric est trop confiant sur sa capacité à se dissimuler. La Psychologue détecte une forte intériorisation de sa personne et lui propose de travailler sur l’extériorisation de ses sentiments. « Je ne dois pas être tenté de prendre la fuite avec elle… » se disait-il en la fixant.

À sa sortie, il a de l’Érik Satie dans la tête.

Il prend un hot dog dans un food truck (3,60 €.)

Il ne rentre pas chez lui tout de suite car il a une séance de kiné. S’y dirigeant à pieds, des vagues étranges parcourent son pied gauche. Il arrive trop tôt et constate qu’il a oublié de prendre du liquide pour payer ses cinq premières séances. Eric s'assoit dans un petit parc à côté. Il écoute le vent.

Sa rêverie est interrompue par un message de son fils qui l’informe qu’il n’y a plus de gaufres. Un crochet au supermarché étant prévu de toute façon, il s’y attela après sa séance (37,16 €).

Dès son retour, Eric est accueilli par Lucas qui regarde tranquillement la télé, mais la fatigue le gagne et il s'allonge dans sa chambre pour s'assoupir très rapidement.

À son réveil une heure plus tard, il apprend via un fil d’infos le décès à 60 ans de l'auteur américain de BD autobiographique Joe Matt. Se relevant doucement de son lit et s’avançant vers sa salle de bain pour se mettre de l’eau froide sur le visage, il contemple ce visage de cinquantenaire dégoulinant. Il accuse le coup.

Eric regarde Deux moi de Cédric Klapisch. Le film lui parle.

La chaleur ambiante invite aux plats les plus simples : Il compose une salade de tomates avec des dés de fromages avec quelques morceaux de chorizo.

L'Échine du Diable de Guillermo del Toro clôt cette journée.

 

Coût de cette journée : 40,76 € et un mort.