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Pascal Craveri - Auteur BD

Je suis auteur de BD, illustrateur et portraitiste. Edité chez MORRIGANE éditions sur 4 romans jeunesse. Auteur également de la série BD en 3 tomes "SUIS LE FLEUVE" chez YIL édition. Depuis 2010 je dessine mon fils tous les mois! :)

Le Coût d'une journée - Chapitre 2 : Sans éclat _ 3

Publié le 24 Avril 2024 par Pascal Craveri

Eric déambule dans des rues très étroites et escarpées remplies de boutiques vendant des produits consommables et des figurines de la Pop culture. Il a un rencard avec un groupe d’ami(e)s. À l’approche du lieu de rendez-vous, l’excitation se faisait de plus en plus sentir, associée aussi par un fort sentiment d’appréhension. Ce yo-yo émotionnel était tel qu’une barre traversait en diagonale le bas de son pantalon. C’est alors qu’Eric ouvrit les yeux. Il toucha son corps spongieux : Ouf ! Pas d’inquiétude à avoir, il a toujours le contrôle !

En remplissant sa machine à laver, il entend au loin à la radio le sujet du jour de "Grand Bien vous fasse" : Bien choisir son appareil ménager.

Grignotant des petits pains grillés Pelletier Villageois, Eric s’accoude à sa table en écoutant de concert la radio et le cycle de sa machine en cours. Il a le temps de se préparer, le tramway passe à heure fixe.

Le tramway ne vient pas.

Eric appelle Ka-L pour savoir si elle peut l'emmener au travail (Partisan du moindre effort, Eric n’utilise son véhicule personnel que pour des longues distances en plus d’éviter de le garer dans son quartier). Elle semble malade au téléphone.

Sous une pluie battante, il se dirige en bas de chez elle. Force est de constater qu’elle ne le considère pas comme une menace pour lui avoir indiqué son lieu d’habitation. Il retrouve, étonné, Gé-ry qui attend aussi devant chez elle. « Ou alors elle est confiante sur ses capacités. » Eric note pour lui cette supposition.

Au détour d’un virage serré, il apprend qu'elle s'est prise sur le visage la déflagration du court-circuit d'hier. « J’ai dégobillé sévère, lance-t-elle, et la réunion s'est très mal passée en plus ! » Elle ne developpe pas plus.

Il y a un peu plus de diversité aujourd'hui au travail. Il y a du retard dans la collecte des produits ainsi que leur consignation par catégorie. Eric est chargé aujourd’hui de ce travail qui mérite toute la chronophagie qui le caractérise. Il lui plaît de ranger et compartimenter tous ces éléments qui constituaient auparavant un être mouvant. C’est avec respect qu’il les manipule et les note sur son fichier Excel. Il ne voyait plus celui qui était chargé de cette tâche auparavant. V-ki de son Code-nom. Ces manières de brut qui ne correspondaient pas à la rigueur d’une telle responsabilité ont dû amener le Pourvoyeur à une décision des plus radicale.

La rigueur du travail d’Eric lui permet ainsi de limiter sa présence et de gagner du temps libre.

En sortant, il leva la tête vers le ciel. Un avion passe... et un bus aussi ! Il le prit dans la volée et s’arrêta à la frontière du centre-ville.

Il fait beau et frais, un sacré contraste après la pluie de ce matin. Eric passe à côté de l’ancienne maison des parents de son ex-femme, porte condamnée, fenêtres murées. Lors de leur première rencontre, il sû, face au malaise ambiant, qu’il avait été percé à jour. Cela l’avait même inquiété un temps. Pourtant, malgré leur réticence à céder leur fille, ils n’ont pas hésités à quitter la ville. Eric fut surpris d’un tel retournement de situation : « L’esprit filial n’a que peu de poids face à l’instinct de survie. Bah ! Qu’ils vivent leur retraite ! »

Un homme passe devant lui avec des jambes complètement imberbes et musclées ; il a l'air d'avoir un certain âge. Eric constate une légère asymétrie au niveau de ses oreilles. Lui-même est asymétrique depuis son opération au cou. La seule information visuelle qui peut le confondre sur son activité. Il se garde bien maintenant de le montrer en portant le plus souvent possible des chemises à col relevé (ce qu’il aurait dû faire à sa première visite de ses ex beaux-parents).

Un conducteur en trottinette passe encore de le renverser. Un regard oblique d’Eric l’oblige à s'excuser.

Eric passe dans la rue où ce matin, sous la pluie battante, il avait entraperçu un objet lumineux par terre qui clignotait. C'était un stylo. Incongru. Il lui rappela sa fuite d’il y a quelques jours. Le souvenir du petit bouclé aussi.

Sur le trottoir d’en face un couple court en rythme. La jeune femme est comme l'ombre portée de son compagnon.

Plus loin un homme apostrophe un cycliste qui allait rouler sur le chien de sa compagne : « Ce n'est pas merci mais désolé qu'il faut dire ! »

Un quidam à un autre fait la remarque que les jeunes ne se saluent plus en se disant bonjour, mais en s'insultant.

Dans la rue, un homme tient d'une main son sandwich et de l'autre la poussette de son enfant entre le trottoir et la route. Un choix cornélien se joue.

Il est 13h. Eric s’arrête pour se prendre un bagel poulet curry et un verre d'eau glacé (5,50 €). Au hasard d’une ruelle, il aperçoit dans une librairie deux mangas qui l’interpellent : Mon père alcoolique et moi et Survivre à ses parents toxiques de Mariko Kikuchi. Il sort une vingtaine d’euros de sa poche.

Deux très jeunes garçons en trottinette électrique foncent dans la galerie marchande des Condamnés sans se soucier des passants.

Le temps commence à se couvrir, le coup d’envoi propice pour un retour anticipé.

Lucas est encore au collège pour un bon moment et Eric se fait avoir par le téléfilm Les Naufragés du Lagon Bleu de Mikael Salomon et Jake Newsome. En regardant les scènes de sexe sur la plage (agrémentées de mauvais choix musicaux), Eric se pose la question du sable qui pourrait rentrer dans le pénis ou le vagin des personnages.

La seule chose qui donne de l'intérêt à ce métrage c'est le corps de l'acteur Brenton Thwaites parfaitement équilibré et musclé. Eric regarde ce jeune couple discuter après leur coït et il pense à son fils hier qui lui a avoué s'être pris un râteau par sa crush.

Dans le film, la fille avoue que c'est sa première expérience sexuelle et qu'elle a eu du sable dans des endroits bizarres. Eric rit de sa prescience.

Trois prunes très mûres au point d'enlever la peau facilement finissent dans la bouche d’Eric.

Tout en pliant son linge, il regarde Le Lagon Bleu de Randal Kleiser.

Sa mère l'appelle à ce moment-là pour l'inciter à regarder la venue du Pape François au "Stade Vélodrome de Marseille". Eric regarde la fin de la messe et les remerciements de l'archevêque de Marseille. Cela faisait depuis François 1er qu'un Pape n'était venu en France. Il se voit étrangement à l'unisson à la bénédiction du Pape. Il lui revient en mémoire les psaumes et les citations qu’il chantait à l'église. Un temps révolu.

Louis, un nourrisson d'un mois, a été béni par le Pape, cela amuse Eric : « Il aura le privilège d'avoir les photos et vidéos du monde entier comme album souvenirs. »

Oh Happy Day interprété par Natasha St-Pier conclut cette parenthèse amusante.

C’était l’heure pour Eric de déposer Lucas chez sa mère. Celui-ci prenait d’ailleurs un malin plaisir à prendre tout son temps. La météo était redevenue exécrable. Marchant derrière son père, Lucas n'hésite pas à faire une blague en écrivant à sa mère son intention de rester avec lui. À l’annonce de cette farce, Eric eut un haut-le-cœur : Le statu quo et cette garde partagée était le socle qui lui permettait de garder son activité. L’image du petit bouclé commençait à s’afficher à la place du visage de son fils. Eric secoua la tête.

Arrivée chez son ex-femme, il l’a trouva souriante : « Elle a la blague facile… »

 

Coût de cette journée : environ 30 € et une frayeur.